Culture

120 battements par minute: au rythme de la vie ****

Elhana Beaulieu, Finissante du Mont Notre-Dame 26 octobre 2017

Coup de coeur du Festival de Cannes où il a remporté le Grand Prix, 120 battements par minute expose sans fard la vie des militants des années sida, comme une fresque historique d’une époque révolue mais pas si lointaine.

C’est une histoire plus ou moins cohérente, chaotique que raconte ce long-métrage criant de vérité. Parfois difficile à comprendre mais toujours sincère, les hauts et les bas de la vie y sont montrés sans détour, comme en raffole le cinéma français. C’est cru, c’est vivant, c’est vrai, tout comme les émotions qu’il suscite. Des thèmes universels comme l’amour, la maladie ou le deuil sont abordés à travers les réunions hebdomadaires et les actions publiques du groupe Act Up-Paris, qui se dévouait alors corps et âme pour faire entendre sa voix et avancer la cause. On y retrouve également une large galerie de personnages, tous engagés, terriblement humains dans leurs élans comme dans leurs travers. Le titre, qui peut paraître hors de propos, fait référence au rythme prenant de la house music qui sert de trame sonore au film, entrecoupée de silences tout aussi bruyants.

Certains diront qu’il y a des longueurs et ils n’auront pas tort. L’histoire se développe lentement, emprunte différents chemins avant de trouver sa voie, mais il est difficile de lui reprocher tellement son impact émotionnel demeure percutant. C’est d’autant plus impressionnant sachant que Robin Campillo, le réalisateur, n’en est qu’à son troisième film dans cette fonction. Il l’exerce cette fois-ci avec brio, jouant sur les plans généraux montrant l’ampleur des manifestations en opposition avec une grande quantité de gros plans sur les visages des protagonistes, pour capturer chaque émotion, chaque regard.

C’est cru, c’est vivant, c’est vrai, tout comme les émotions qu’il suscite.

Les regards, qui sont d’une importance capitale dans cette ode au militantisme, laissant voir ce que les mots taisent pour mieux raconter les émotions, la source de cette oeuvre. Des regards que les jeunes et talentueux acteurs, Nahuel Pérez Biscayart en tête, ont su jouer pour insuffler au film cette énergie, cette qualité réelle qui le démarque des productions hollywoodiennes et autres films destinés à un grand public. 120 battements par minute n’est pas conçu pour plaire à tout le monde, mais il rejoint beaucoup d’entre nous, même si son visionnement requiert de la patience et de l’ouverture pour être pleinement apprécié.

Au final, 120 battements par minute est une immersion totale dans un monde qui nous est pour la plupart méconnu, une expérience marquante, choquante même. Le génie de ce film n’est pas tant qu’il nous frappe pendant l’écoute, mais qu’il nous travaille, nous hante en distillant lentement ses parfums, jusqu’à se tailler une place. Et c’est peut-être ce qui fait les vrais grands films.

Source des photos:

Photo principale de l’article: Lesinrocks.com

Photo à la fin de l’article: Cinenews.be

Elhana Beaulieu Finissante du Mont Notre-Dame